L’hôtel de ville de Curepipe casse sa pipe
Trous béants dans le toit et le plafond, dalle suintante, colonnades rouillées ou en bois pourrissant… L’hôtel de ville de Curepipe se meurt. Datant du XIXe siècle, ce bâtiment colonial jadis imposant et majestueux fait aujourd’hui pâle figure. Pire, il me fait honte.
Bâti à son emplacement actuel en février 1902, l’hôtel de ville de Curepipe était à l’origine une somptueuse demeure du district de Moka. Appelée La Malmaison, cette bâtisse fût ensuite démontée et reconstruite à l’identique à Curepipe. L’hôtel de ville témoignait alors de la prospérité de la ville et représentait un des chefs-d’œuvre de l’architecture locale, comme l’illustre cette photo de 1915 :
Cependant, tout ce prestige a aujourd’hui disparu. Avec des bâches posées maladroitement sur le toit pour contrer les fuites d’eau, le bâtiment est dans un état d’abandon et de décrépitude avancée. Il est aussi devenu un repère pour amateurs de beuveries. Des images qui me font honte en tant que Curepipienne, et surtout qui me font de la peine. Ces photos ont été prises le samedi 15 octobre 2016 :
Par ailleurs, je ne suis pas la seule à être attristée par la dégradation de ce bâtiment qui avait autrefois une grande importance dans la vie sociale et culturelle des Curepipiens. Simone, Curepipienne de 62 ans, témoigne. «Cela me fend le cœur de voir l’état dans lequel se trouve l’hôtel de ville aujourd’hui. J’en garde, malgré tout, de très bons souvenirs. Autrefois, mes parents et moi y allions pour des fêtes, telles que le bal de la Fête du printemps, le reposoir de la Fête Dieu, mais surtout pour les mariages. L’intérieur de la salle de fête, avec ces immenses miroirs et luxueux lustres, était magnifique ! Nous en étions fiers car il y avait peu d’infrastructures aussi belles à Curepipe. Aujourd’hui, je suis très triste. Je souhaite que mes petits-enfants découvrent l’hôtel de ville avec sa splendeur d’antan», déclare-t-elle.
Alvino, sexagénaire de Curepipe, abonde dans le même sens. «L’hôtel de ville est méconnaissable ! Je me souviens des mariages, des bals et des tournois de tennis de table qui y étaient organisés quand j’avais 10 ou 12 ans. Mais là, c’est vraiment dommage. Il est vrai que la maintenance coûte cher et que des réparations avaient été faites, il y a une dizaine d’années, afin de remettre l’hôtel de ville en état. Cependant, sans entretien ça ne sert à rien », conclut-il, désabusé.
Un sentiment que je partage. Certes, il est malheureux de le dire, mais après une histoire très riche et avec ses portes aujourd’hui barricadées, l’hôtel de ville de Curepipe casse sa pipe.
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