Elorac

Citoyens

En ce 12 mars 2021, l’Ile Maurice reconfinée célèbre le 53e anniversaire de son indépendance. Si j’ai souvent écrit sur le pays lui-même, force est de constater que j’évoque rarement la principale richesse et les principaux bâtisseurs de l’île : ses citoyens.

Citoyen_Ile Maurice-Mauritius_Mondoblog
Action citoyenne pour la sauvegarde d’une plage à l’Ile Maurice. « Citoyen », ici écrit en créole : sitwayen !

Citoyen. Voilà un mot que nous entendons de plus en plus depuis l’année 2020. Outre la pandémie du Coronavirus, dont l’Ile Maurice traverse actuellement la deuxième vague, le pays a aussi été marqué par de nombreuses marches nommées “marches citoyennes”. Ces évènements sont d’autant plus à être soulignés, du fait que la nation mauricienne est d’ordinaire très calme et que des manifestations de masse dans les rues est un acte rare et inédit pour l’Ile Maurice récente.

Plateforme citoyenne, marche citoyenne, débat citoyen, mobilisation citoyenne, citoyens engagés, activistes citoyens, militants citoyens… Ces expressions font désormais partie du paysage audiovisuel des Mauriciens. Ces locutions marquent une certaine rupture, car nous avions plutôt l’habitude, jusqu’à récemment, d’entendre des expressions telles que simple citoyen, citoyen lambda, voire encore citoyen ordinaire. Cependant, l’ironie de l’histoire veut que le citoyen, dès l’apparition de ce terme, n’ait rien d’ordinaire. Bien au contraire !

En effet, le mot citoyen vient de la Rome antique et du latin « civitas ». Il servait à dénommer ceux qui avaient droit de cité. Un individu libre, ayant des droits et prenant part à la vie religieuse et politique de la cité romaine, contrairement aux esclaves. La notion de participation des citoyens nous renvoie aussi au terme démocratie, qui nous vient du grec ancien demos (peuple) et kratos (pouvoir). Donc, le pouvoir au peuple, par opposition à l’aristocratie, qui est l’exercice d’un pouvoir réservé à une élite (aristos veut dire « meilleur » et kratos « pouvoir »).

Il est pertinent de souligner qu’outre le mot citoyen, les termes citadin, civique et civisme, entre autres, tirent leur racine du même latin « civitas ». Le civisme consiste en l’apprentissage à vivre avec les autres, semblables ou radicalement différents de soi, et à agir et construire pour le bien commun, dans le respect de tous. En France, l’Education Nationale a mis en place un Parcours citoyen. Il « vise à la construction, par l’élève, d’un jugement moral et civique, à l’acquisition d’un esprit critique et d’une culture de l’engagement dans des projets et actions éducatives à dimension morale et citoyenne’‘. Les élèves font ainsi l’expérience du pouvoir d’agir des citoyens.

Le civisme, c’est aussi respecter un ensemble de règles et d’usages admis par le plus grand nombre : la société. L’écrivain français Bernard Epin nous rappelle que le civisme utopique serait une sorte de jeu de société : tous égaux, tous avec le même nombre de cartes, sur la même ligne de départ. Or, la vraie vie n’est pas un jeu de société. Les choses y sont bien plus complexes.

« Les Hommes naisssent libres et égaux en dignité et en droit« ,  indique la Déclaration universelle des Droits de l’Homme, document fondateur des Nations Unies. Egaux en dignité et en droit peut-être, mais certainement pas en qualité de vie, en accès aux ressources, etc. Certains en profitent plus que d’autres, engendrant ainsi injustices et discriminations qui portent atteinte à la cohésion sociale. Mais la citoyenneté, c’est aussi trouver des réponses et des solutions. Pandémie, récession, chômage, violences faites aux femmes, corruption, drogue, dérèglement climatique, insécurité, pauvreté, les problèmes sont hélas nombreux.

Toutefois, comme l’explique Epin, « au jeu, les règles sont fixées une fois pour toutes. Or, l’histoire de l’humanité montre comment, tout au long des siècles, le fonctionnement des sociétés n’a cessé de se transformer par l’action d’hommes et de femmes à la recherche de plus de bonheur« . Ces hommes et ces femmes, c’est vous, c’est moi, c’est nous tous, tel que nous sommes. Chacun contribue à la société de demain, chacun façonne et invente aujourd’hui l’Ile Maurice de 2050.

J'ai fièrement mis le quadricolore mauricien dans mon jardin!
J’ai fièrement mis le quadricolore mauricien dans mon jardin!

Par ailleurs, avec la résurgence du Coronavirus et le reconfinement depuis le 10 mars, il revient à chaque Mauricienne et chaque Mauricien de faire preuve de civisme et de respecter les consignes sanitaires, ainsi que les gestes barrières. Avec plus de 90 cas positifs au Covid, nous sommes tous un maillon essentiel, avec une responsabilité immense dans la lutte contre la pandémie.

En ce 12 mars 2021, Fête Nationale d’une l’Ile Maurice troublée et reconfinée, célébrons donc notre principale richesse : nos citoyens ! Ensemble face à l’urgence!


Voyager en 2021, en vain?

Bonjour 2021 ! Ciao 2020, année, la plus irréelle qui nous ait été donnée depuis des lustres ! Comme de nombreuses personnes, j’avais prévu de voyager en 2020, mais le coronavirus en a décidé autrement.

Il y a deux ans à l’aéroport de Newark dans le New Jersey, en attendant mon prochain vol…


Ainsi, c’est la première fois que je ne prends pas le moindre avion, deux années de suite. La sensation est souvent bizarre : un sentiment d’être « coincée » sur une petite île, «isolée » du monde. Un billet ouvert, mais une année 2020 confinée, où les frontières font barrières. Qu’est-ce qui nous attend en cette année 2021 ? Voyager ou pas ? Prendre le risque et accepter de passer par la case quarantaine ?

Une demie journée à attendre mon avion à l’aéroport de Vienne. Duty free fantôme.

Qui a dit qu’on ne pouvait pas voyager en 2021 ? Embarquement immédiat avec moi, sac sur le dos et passeport en main, pour un tour en Afrique, en Europe et aux Etats-Unis d’Amérique !

1.Dakar mon amour
Le Sénégal, quelle belle aventure ! Le séjour à Dakar avec toute l’équipe de Mondoblog m’a permis de découvrir une ville magnifique, riche en couleurs et en saveurs. Dakar 2015, cela a aussi été une fabuleuse aventure humaine : la vie en groupe, les repas au bol, les trajets en car, les antimoustiques, etc. Inoubliable !

2.Vous avez dit Vieux Continent ?
Non pas du tout ! L’Europe est un continent dynamique où il fait bon vivre…et étudier !! Cependant, les choses sont nettement différentes actuellement, avec l’enseignement supérieur en souffrance à cause du coronavirus et des étudiants qui décrochent. Pour ma part, je garde de merveilleux souvenirs de mes études à Tours, de mon séjour inoubliable en Vendée, de mes escapades à Paris, à Belfort, Londres, Dublin, entre autres. Place à quelques-unes des aventures européennes ici et ici !!

3.L’océan indien et ses paillettes
De l’Ile Maurice, aux Seychelles en passant par la merveilleuse Ile Rodrigues, l’océan indien regorge de beaux territoires, tous uniques. De la Réunion, je n’ai connu que les sièges de l’aéroport Roland Garros et de Madagascar, uniquement ce que m’en disaient mon pote Pov, et les présents de mon oncle Gérard. J’espère bien visiter ces deux beaux pays un jour. Mo kontan mo bann zil !!

4.You’re in New York !

New-York, mon cœur, mon amour.


Ce petit tour de mes péripéties à l’international serait incomplet sans parler de celle qui restera pour moi sans doute la plus belle : New York ! La Grosse Pomme, c’est l’énergie, la découverte, la vitesse grand V, la musique et la liberté ! J’espère vivement y retourner. Des Nations Unies, à Grand Central, en passant par Ground Zero, découvrez pourquoi j’aime autant New York !

Mesdames et messieurs, bienvenue à destination. Nous sommes en 2021 et le coronavirus est toujours là. Il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une merveilleuse année. J’espère que vous avez fait bon voyage et je vous dis à bientôt, à bord de Mondoblog !


Haro sur le pervers narcissique !

Vous croyez entrer dans une belle histoire d’amour, mais vous en sortez vidée et avec un doctorat sur la personnalité narcissique ! Malheureusement, cela arrive plus souvent que vous ne le pensez, tant les pervers narcissiques sont habiles et cachent bien leur jeu. Zoom sur un phénomène psychologique destructeur.

Ça commence comme une belle histoire d’amour. Le prince est charmant et charmeur, et la princesse est amoureuse, heureuse comme elle ne l’avait jamais été auparavant. Croiser cet homme, sentir un doux frisson à chaque regard échangé, ressentir une connexion venue d’ailleurs, quelque chose d’inexplicable, d’âme à âme. Un sentiment aussi puissant, ça ne peut qu’être le grand amour ! Honnête et sincère, la belle est prête à tout pour son prince.

Et cela, le dit prince l’a bien compris ! C’est justement ce dont il se nourrit : la persévérance et la patience. Même s’il essaie, avec intelligence et habileté, de se faire passer pour l’homme idéal au début, il laisse parfois échapper quelques phrases révélatrices, comme « You’ll have to earn me ». Si la victime peut croire à une petite blague, elle ne tardera pas (ou dans le pire des cas, tardera !) à réaliser que le pervers narcissique était sérieux, et que sa phrase était à prendre au sens littéral.

En effet, tel un vampire ou une sangsue, le pervers narcissique fera tout pour vider sa partenaire/victime. Il demandera et prendra toujours plus, tout en donnant de moins en moins en retour : ni temps, ni affection, ni respect. C’est ainsi que la personnalité narcissique créée une sensation de manque et de dépendance affective. Il joue avec les sentiments et l’espoir de ses victimes : si tu me donnes, peut-être que je pourrais t’aimer. Et la victime amoureuse est prise au piège, elle donne toujours plus, dans l’espoir d’avoir de l’amour en retour… Elle aime, donne, pardonne, patiente, croyant naïvement qu’un amour inconditionnel peut changer Prince Pervers.

Grosse erreur ! Car le pervers narcissique n’éprouve aucun sentiment, aucune honte et aucun altruisme. Il n’y a que lui qui compte, personne d’autre. Il est là pour SE satisfaire et tirer tout ce qu’il peut de sa proie, avant de l’abandonner, émotionnellement détruite et vide. Faire des projets, même à court terme, avec un pervers narcissique ? N’y pensez même pas !

N’ayant aucun affect, donc incapable d’éprouver sympathie ou souffrance, le pervers narcissique détruit et blesse sans remords. Laisser femme et six enfants en bas-âge pour s’installer aux tropiques ? Aucun problème pour le narcissique ! Mentir, duper et tromper son monde sans arrêt ? Retourner sa veste? Les doigts dans le nez pour le narcissique !

« Je n’ai jamais connu de complicité, ni avec ma première femme, ni avec ma deuxième femme », lâche le narcissique, voulant se faire passer pour une victime. « I wish her dead. Je la déteste. Heureusement que je t’ai. ». Si au début le pervers narcissique prenait soin à se maculer en prince charmant, une fois sa proie prise dans ses filets, il se montre sans filtres et sans aucune compassion.
Et là, les phrases peuvent être d’une violence extrême

« Tu as passé une mauvaise journée ? Garde tes problèmes pour toi, je n’ai pas envie de négativité dans ma vie! »

« Je n’ai que des œufs. Si tu veux manger autre chose, vas te l’acheter. Y’a un supermarché au coin de la rue. »

« Tu m’emmerdes avec ton histoire de passer du temps ensemble. »

« Je croyais que tu allais payer le déjeuner. J’aime les femmes qui payent. »

« Tu es une pourriture, un serpent ! Ma vie sera un enfer avec toi !»

Le pervers narcissique a la prétention de connaître l’avenir, il se croit omniscient et est très imbu de sa personne. Il n’a nullement envie de soutenir ou de valoriser sa victime. Au contraire, il va s’acharner à la dénigrer, à la faire perdre confiance et à douter d’elle-même. Le narcissique va isoler sa victime, aucune rencontre avec les amis ou la famille de cette dernière n’est envisagée pour lui. Il « aime », mais à SES conditions. C’est soit cela, soit rien.
Même au niveau affectif et sexuel, le pervers narcissique souffle le chaud et le froid, ignorant les sentiments et besoins d’autrui. Alors que la victime pense faire l’amour, le pervers narcissique utilise l’acte sexuel comme une arme :

« Je t’aime. J’ai envie de toi. »

« Tu as un problème avec le sexe. Tu es comme toutes les autres femmes. »

«Heureusement que Rolance et toi n’êtes pas les seules femmes à avoir un vagin. »

« Tu as beaucoup d’amour dans ton coeur. Merci pour ta patience avec moi. »

« Je couche avec plusieurs femmes et j’ai bien l’intention de continuer. »

« Je n’aime que Dieu, toi et mes 8 enfants. »

« R1800. R1, c’est moi, le meilleur, le number one. 8 pour mes 8 enfants. 00 pour les deux trous, mes deux femmes »

« Tu as peur que je te transmette une MST? Va faire le test toi-même ! »

« Les femmes, c’est un vagin, c’est juste un bout de viande. »

« I know you care, thank you for having my back. »

« Je veux tout essayer avec toi. »

Et pire, quand il est confronté à ses propres paroles, le pervers narcissique les dément formellement, insinuant que la victime fabule, invente et exagère. Il est maître dans l’art du gaslighting, c’est-à-dire de faire douter quelqu’un de sa propre réalité. Les exemples sont multiples : il donne des rendez-vous et ne vient pas ; aime et déteste sa victime à sa guise ; elle n’a rien fait de mal, mais c’est à elle de s’excuser. Il y a un gouffre immense entre les paroles et les actions d’un narcissique. En une conversation, il dit vouloir faire sa vie avec vous et être fier de vous tromper (!).

Par contre, en termes d’actions concrètes, le pervers narcissique, vindicatif, est toujours dans l’attaque et la punition. Vous avez osé décaler un rendez-vous d’un jour ? Le pervers vous le fera payer au centuple ! Essayez d’avoir un nouveau rendez-vous avec lui et la réponse sera « Tu as décalé notre déjeuner la dernière fois, alors je ne vois pas pourquoi je devrais te donner un nouveau créneau. ». C’est là que le fameux « You have to earn me » devient plus clair.

Il vous faudra TOUT payer : payer de vos sentiments, de votre corps, de votre psychologie, et de votre âme. Payer de tout ce qui n’a pas de prix. Et c’est là que la victime commence aussi à saisir la connexion si mystique du début. De l’amour ? Non, de la toxicité ! Les narcissiques sont attirés par les empathiques, car ces derniers ont quelque chose de précieux qu’eux n’ont pas: un cœur tendre et généreux. Le empathiques ressentent les choses, alors que les narcissiques n’éprouvent rien. Ils sont vides de l’intérieur et ont besoin de se nourrir des sentiments des autres. Un narcissique prend sans limite et un empathique donne sans limite. Connexion toxique assurée !

La phrase fétiche du pervers narcissique : «Je sais que tu m’aimes ». Il fera donc tout pour aspirer et détruire cet amour, avant d’abandonner sa victime, brisée et vidée ; et d’enchaîner avec une autre proie.

D’Albion, à Birmingham, Cannock, en passant par Montpellier ou Floréal, le pervers narcissique sévit partout, se délectant sans cesse des souffrances qu’il cause.

Un seul conseil, si vous le rencontrez, fuyez ! Que cela prenne un mois, un an ou une décénie, courage, fuyez !


Ile Maurice: marée humaine contre la marée noire du Wakashio

Historique. C’est ainsi que l’on peut peut qualifier la journée d’hier, samedi 29 août 2020, à l’Ile Maurice. En effet, cette journée a été marquée par un énorme mouvement citoyen: une dizaine de milliers de Mauriciens s’est mobilisée dans les rues de la capitale, Port-Louis. Cette mobilisation intervient dans le sillage de l’échouage du navire Wakashio dans les eaux mauriciennes, et dans celui de la fuite d’hydrocarbure et le désastre écologique qui en ont découlé.

Mobilisation des Mauriciens dans les rues de Port-Louis, le 29 août 2020. Crédit photo: Jason Chan.
La marche citoyenne en une des principaux dominicaux mauriciens, en ce 30 aôut 2020.


Une marée noire dans les eaux turquoises du Sud-Est de l’Ile Maurice, la plupart des Mauriciens n’ont jamais imaginé ce scénario, même dans leurs pires cauchemars. Et pourtant, ce cauchemar est bel et bien une réalité. Le MV Wakashio, vraquier japonnais battant pavillon panaméen, s’est échoué sur les récifs au large de Blue Bay, le 26 juillet 2020. Et à partir du 11 aôut 2020, de l’huile lourde a commencé à se deverser du navire, souillant les eaux mauriciennes et menaçant l’écosystème marin du Sud-Est, et ainsi toute une chaîne économique fondée sur la pêche, le tourisme et les resources marines.

Marée noire à l’Ile Maurice, causée par une fuite d’hydrocarbure du vraquier MV Wakashio.

Par ailleurs, coïncidence ou pas, près d’une cinquantaine de dauphins d’Electre morts se sont échoués sur les plages du littoral sud-est depuis mardi 26 aôut. Des scènes d’une grande tristesse et détresse, à la fois humaine et animale.


La catastrophe est sans précédent. La réaction des citoyens Mauriciens l’est tout autant. C’est un véritable élan de patriotisme, de solidarité et de débrouillardise qui a porté les Mauriciens depuis le début du mois d’aôut. Comme ce fut le cas, lors des Jeux des Iles de l’Océan Indien 2019, le peuple mauricien s’est levé et a agit comme un seul homme. L’échouage du Wakashio a ainsi permis au mauricianisme de se manifester et de réagir. A la lumière de ces évènements, voici quelques-uns des éléments, qui, à mes yeux, prennent une toute autre dimension et font partie du mauricianisme:

  1. Canne à sucre ? Présente !
    La canne à sucre fait partie de l’ADN historique de l’Ile Maurice. La culture de cette plante a longtemps rhytmé la vie socio-économique du pays, et même aujourd’hui les Mauriciens aiment les champs de cannes verdoyants, le parfum de la mélasse, etc. Avec la crise du Wakashio, la canne à sucre a pris une toute autre dimension. En effet, nous avons utilisé des résidus de canne séchés, afin de confectionner des bouées artisanales pour absorber l’hydrocarbure. Face à l’urgence, les Mauriciens de tout âge et de toute région se sont mobilisés jour et nuit pour fabriquer ces bouées, aussi appelées boudins.
Je me suis aussi attelée à la fabrication de bouées de bagasse.

Marcher en plein milieu des champs de cannes, et nous voir mes compatriotes et moi même se battre pour protéger notre Ile, et ce à la sueur de notre front et dans une course contre la montre, ne m’a pas laissé insensible. Malgré la course effrenée, le temps était comme suspendu.

2. Kaya : l’homme qui transcende
Qu’on le veuille ou non, Kaya fait partie de l’Histoire de l’Ile Maurice, de l’Histoire avec un grand H. Il n’a eu cesse d’écrire et de chanter le Mauricianisme dans toute sa complexité; de chanter l’amour de son pays et de son peuple. Impossible donc de rester de marbre quand les Mauriciens ont entonné Ras Kouyon lors de la mobilisation d’hier à Port-Louis.

Kaya n’est plus, mais Kaya transcende. Il est des combats d’hier, d’aujourd’hui et de demain. Kaya était en avance sur son temps, prônant un Mauricianisme au-dessus et au-delà des barrières. L’héritage qu’il nous a légué est immense et cela s’est ressenti lors de la marche d’hier.

3. Le Mauricianisme au-delà des frontières
Il est très rare de voir autant de Mauriciens descendre dans les rues pour contester. De mémoire, c’est bien la première fois qu’un tel évènement se produit. Force est de contaster que cet élan patriotique a dépassé les frontières locales. En effet, qu’elle soit en Australie, au Canada, en France ou en Suisse, la diaspora mauricienne s’est mobilisée en signe de soutien aux Mauriciens au pays. Le quadricolore mauricien a flotté en Europe et ailleurs, preuve d’une solidarité au-delà des frontières. Outre le drapeau, une bouée traditionnelle s’est même trouvée devant le siège genevois de l’ONU, comme un petit clin d’oeil aux bouées de bagasse.

Alors que l’Ile Maurice, essaie de reprendre le rhytme post-déconfinement, voilà un autre coup dur. Selon les spécialistes, nous subirons les conséquences de la marée noire du Wakashio et la catastrophe écolologique en cours sur les dix prochaines années. Face à la marée noire, c’est une véritable marée humaine, rouge-bleu-jaune-vert qui s’est mobilisée. C’est souvent lors de telles situations de crise qu’émergent des êtres charismatiques, des citoyens qui fédèrent, des individus qui n’ont pas peur, qui osent et qui agissent. Chapeau!


Black Lives Matter : quand la musique explique le passé

Comme si le Covid-19 ne suffisait pas, le mois de juin et le mouvement Black Lives Matter ont jeté une lumière crue sur un autre virus qui ronge l’humanité : celui du racisme.

La mort de George Floyd, assassiné sous le genou d’un policier blanc, a été la goutte d’eau qui a fait déborder un vase déjà déversant, et fait déferler la vague Black Lives Matter. En effet, la liste des noirs, des afro-américains tués par des policiers blancs ou par leurs concitoyens blancs est déjà très longue.

Expliquer le passé

Le mouvement a aussi permis de décomplexer un autre regard sur l’histoire des Etats-Unis. De nombreuses statues, en lien avec le passé esclavagiste du pays, ont été déboulonées. Pour ma part, je suis d’avis que les statues font partie de l’Histoire, et à ce titre, il ne faut pas détruire, mais plutôt éduquer et instruire, expliquer le passé.

Force est de constater que la musique peut aussi servir à des fins pédagogiques et historiques. C’est donc tout naturellement que je me suis intéressée à l’effet de Black Lives Matter sur le monde de la musique. Conséquemment, j’ai eu envie de mettre en lumière quelques aspects de l’histoire esclavagiste étasunienne à travers un double prisme, celui de Black Lives Matter et de la musique. Et pour m’aider, deux groupes de country : The (Dixie) Chicks et Lady A(ntebellum).

  1. The (Dixie) Chicks

Composé de trois femmes, The Dixie Chicks est un groupe du Texas très populaire, fondé en 1989. Je les ai beaucoup écoutées au début de mon adolescence et j’avais même choisi Goodbye Earl comme chanson coup de coeur. Figurez-vous qu’après 31ans d’existance, le trio a décidé de changer de nom en 2020, suite à la vague Black Lives Matter. Aurevoir The Dixie Chicks, bonjour The Chicks!

Le mot Dixie est donc supprimé. Et pour cause, “dixie” fait référence a la ligne Mason-Dixon qui était la ligne de démarcation entre les états abolitionnistes du Nord et les états esclavagistes du Sud. Et depuis, le mot “dixie” a toujours une connotation négative, en lien avec le Confederacy et les esclavagistes. Il s’agit du racist South, comme le disait mon prof d’Histoire américaine à la fac.

La Ligne Mason-Dixon. Souce: National Atlas of the United States.

2. Lady A(ntebellum)

Je pense que vous connaissez presque tous la belle chanson “Need you now” de Lady A(ntebellum). Par contre, qui d’entre vous savait que le nom “Antebellum” était en lien avec le Confederacy ? En effet, ce terme provient du latin ante bellum, qui veut dire avant la guerre, soit avant la Guerre de Sécession. En conséquence, le groupe Lady A(ntebellum) a changé de nom, et s’appelle aujourd’hui Lady A.

L’esclavage faisait donc partie prenante de l’Antebellum South. Il en a découlé une version romancée de l’esclavage, bien loin des réalités des plantations du Sud.

Plantation de Louisianne. Source: Flickr

Cette image me rappelle celle d’une ancienne plantation mauricienne, aujourd’hui devenue musée, racontant une version romancée de la vie d’antan. Juste avant que la maison ne devienne musée, il y avait eu cette phrase à la seule noire présente: “N’oublies pas de dire bonjour”.

Rappeler à la jeune fille noire qu’elle doit saluer les Blancs, comme si qu’elle ne connaissait pas le b.a.ba de la politesse. Elle l’a vécu comme le reliquat d’une époque où les Noirs étaient considérés comme des sauvages.

De l’Ile Maurice à Minneapolis, le racisme teinte l’Histoire et il est partout présent. Battons-nous : Black Lives Matter !


Covid-19 : le confinement en 4 points

Confinement. En ce 20 avril 2020, cela fait un mois que ce mot fait partie du quotidien des Mauriciens, et de près de trois-quarts de la population mondiale. Le coronavirus est sorti de nulle part, et tel un tsunami, il a tout bouleversé dans son sillage, contaminant et tuant sans distinction, et surtout il nous a contraint à vivre confinés. 

Le confinement est une grande première pour la plupart d’entre nous. Toutes nos habitudes ont été bouleversées, il a fallu s’adapter et s’organiser. Nouveautés et imprévus, voici un survol du confinement en 4 points. 

1. Maux et mots du Covid-19. 

Personne ne me contredira, le Covid-19 a apporté son lot de maux, de décès et de souffrances. De l’Île Maurice, en passant par New York ou encore l’Italie, aucun lieu n’a été épargné. Outre les maux, il y a également les mots du Covid19 ! En effet, c’est un véritable lexique du coronavirus qui a émergé, avec de nouveaux termes qui font désormais partie de notre vocabulaire quotidien. Parmi eux : quarantaine, confinement, déconfinement, pandémie, crise sanitaire, télétravail, distanciation sociale, gestes barrière, isolation, chloroquine, respirateur, continuité pédagogique, test PCR. Malheureusement, il semble que nous utiliserons ces mots pour quelques temps encore, car le coronavirus n’est pas prêt de nous laisser. 

Merci à Camille, 8 ans, pour ce beau dessin!
Le maître-mot de ce confinement est « Restez à la maison! ». Merci à Camille, 8 ans, pour ce magnifique dessin!

2. Confinement et alimentation 

Le confinement dû au Covid-19 a changé notre rapport face à l’alimentation et à la nourriture. Il y a ceux qui ont cédé au achats paniqués du pré-confinement, et qui ont fait des stocks superflus de nourriture. Il y a ceux qui, pendant le confinement, tentent de faire leurs courses aussi normalement que possible. Sur l’Ile Maurice, tous les supermarchés et épiceries avaient été fermés au public avant une réouverture sous conditions très strictes. En effet, les provisions se font par ordre alphabétique pour limiter les contacts et les risques de contamination, et nous avons uniquement 30 minutes pour effectuer nos courses. 

Après une fermeture complète des supermarchés pendant plusieurs jours, les consommateurs ont été authorisés à faire leurs courses, par ordre alphabétique.
Après une fermeture complète des supermarchés pendant plusieurs jours, les consommateurs ont été authorisés à faire leurs courses, par ordre alphabétique.
Respect de la distanciation sociale par les consommateurs, pendant le confinement.
Respect de la distanciation sociale par les consommateurs.

Un autre moyen de se ravitailler tout en limitant le contact est la commande sur internet pour livraison à domicile. En effet, le confinement aura permis, d’une part, à de nombreux Mauriciens confinés de se faire livrer à la maison pour la première fois, et d’autre part la prolifération de sites de livraison de nourriture. Cependant, il est malheureux de constater que certains commerçants ont profité de la situation pour proposer des paniers hors de prix, et ainsi plumer les consommateurs immobilises, donc n’ayant pas vraiment de choix. 

Quoique, les chanceux qui ont un jardin l’ont bel et bien ce choix ! C’est ainsi que le confinement a poussé bon nombre d’entre nous à faire… pousser fruits et légumes ! Puis il y a ceux qui se sont mis à la pâtisserie et la boulangerie. Pains, gâteaux, pizzas, brioche, tarte, choux, tout y passe et Instagram n’en perd ni une miette ni un gramme ! 

3. Technologie : à la mode de chez soi 

Eh oui, qu’aurait été le confinement sans internet et sans les réseaux sociaux? Il faut bien l’avouer la technologie aide grandement à rendre le confinement plus supportable : nous sommes séparés, mais ensemble ! Le contact est maintenu, le lien entretenu. En quelques clics, nous pouvons presque tout faire de chez nous : les devoirs des enfants, les réunions de travail avec les collègues, ou encore l’apéro avec la famille et les amis. La distance géographique n’existe plus. Merci à WhatsApp, Skype, Zoom, Microsoft Teams et j’en passe ! 

Autre particularité de ce confinement : nous n’avons jamais été chez autant de gens, qui vivent aussi loin, en un temps aussi court. En effet, on ne compte plus les émissions télé, les reportages et les interviews de chez soi. C’est un peu l’ère d’une mode à la maison décomplexée. Allez, on ne va pas se mentir ! Dans les premiers jours du confinement, on s’est tous baladés dans les moindres coins et recoins de chez nous, avec notre ordinateur ou notre portable, à la recherche de la meilleure lumière, du meilleur fond et du meilleur lieu pour se poser en vue de faire le prochain Zoom. Et puis peu à peu, cette contrainte s’est estompée et on s’est habitué à une forme de “en direct à la maison” qui se veut plus décomplexée. Direct de la chambre à coucher, du salon ou encore de la cuisine, on en aura vu bien des intérieurs !  

4. Nouveaux rapports au temps 

 Le confinement se veut aussi en temps débarrassé de certains diktats et cadences imposés par la société. Coupé de cette société, ainsi libéré du regard des autres, l’individu confiné chez lui est souvent décomplexé. Pyjamas, barbes et cheveux en friche, zéro maquillage, c’est un retour au naturel. Cette “rupture” de la société engendre aussi un nouveau rapport au temps. En effet, calendrier, jours, heures, en retard ou en avance, c’est la société qui donne la cadence à notre temps. Mais en temps de confinement tous ces rythmes s’effondrent. On se retrouve soudainement à avoir le temps, si bien qu’on en devient amnésique du nom des jours qui passent. Ceci étant dit, ça fait tellement de bien d’arrêter de courir après le temps. Ce confinement nous a appris à prendre le temps. 

Le confinement et le ralentissement de l’activité humaine a été une bouffée d’oxygène pour notre planète.
Le confinement et le ralentissement de l’activité humaine a été une bouffée d’oxygène pour notre planète.

En effet, nous avons maintenant le temps – le temps de ralentir, d’observer et de contempler. Et quoi de plus relaxant que d’observer la nature qui nous entoure ? Il est indéniable que le confinement et le ralentissement de l’activité humaine a été une véritable bouffée d’oxygène pour notre planète. C’est une pause plus que salutaire. De plus, les experts s’accordent à dire qu’un retour à une vie pré-confinement est quasi impossible et que l’être humain devra changer ses habitudes de vie et de consommation. Faisons donc de cette crise sanitaire une opportunité à saisir, une sorte de bouton “Réinitialisation » envoyé par la providence, pour sauver notre planète, et nous avec. Réinitialisons !   


Francophonie: en ce 20 mars 2020…

J’aurais voulu vous écrire un super billet sur la francophonie!

 J’imaginais déjà l’angle: les 50 ans de la Francophonie; l’honneur que j’ai eu d’oeuvrer pour cette francophonie aux Nations Unies à New York, la fierté que j’éprouve pour la francophonie mauricienne; et mon amour pour cette magnifique chance qu’est la langue française.

J’aurais voulu… Je l’ai fait plusieurs fois d’ailleurs, d’année en année: ici ou encore  

Et voilà que nous sommes arrivés au 20 mars 2020! Les 50ans de la Francophonie, ça se fête quand même! Sauf que cette date marque fatidiquement le début du confinement de l’Ile Maurice à cause du coronavirus. Et oui, avec 7 cas recensés à l’heure où je vous écris, le territoire mauricien est sévèrement touché par la pandémie et la population locale vit, depuis ce matin, son premier confinement. 

Ce vile virus nous force ainsi à tous rester chez soi. Confinés. Et les Mauriciens ne sont pas les seuls dans ce bateau de la crise sanitaire. Nous y sommes tous, ensemble! Que nous soyons en Afrique, en Asie, en passant par les Amériques ou l’Europe, nous sommes tous contraints à nous barricader, à nous calfeutrer, et à garder nos distances.

C’est dans ce contexte d’urgence sanitaire que j’écris ces quelques lignes de l’Ile Maurice, où je suis confinée. Et vous, qui êtes fort probablement aussi confinés, d’où me lisez-vous? J’entends déjà les réponses de mes comparses blogueurs et de la grande famille Mondoblog.

« Notre Francophonie n’est ni une tour ni une cathédrale. Elle s’enfonce dans la chair ardente de notre temps et ses exigences. », declarait Léopold Sédar Senghor en 1986. L’exigence de notre temps, en ce 20 mars 2020, se nomme hygiène, distance et confinement.

La distance n’est rien. Le confinement n’est rien. C’est ça la magie d’être francophone! Nous sommes éloignés, divers et variés, mais unis par une langue et une communauté de valeurs qui transcendent les barrières et frontières. C’est aussi ça la force de la francophonie! C’est la fierté d’appartenir à un ensemble solidaire et hétéroclyte, défendant la diversité linguistique et culturelle.

J’ai attrapé le virus francophone depuis longtemps déjà. Et en ce 20 mars 2020, où le monde entier lutte contre le coronavirus, je souhaite que nous nous battons! Battons-nous contre les virus de l’unilatéralisme et de l’uniformité culturo-linguistique qui menacent notre société.

Le cornonavirus nous a poussé à une sorte de démondialisation forcée. Est-ce le temps de redécouvrir nos pays respectifs, nos langues et nos identités multiples? Est-ce aussi le temps pour nous, confinés que nous sommes, de ré-apprendre à prendre le temps?

Pour ma part, je prends ce temps de confinement pour vous souhaiter une excellente Journée internationale de la Francophonie! Et pandémie oblige, #RestezChezVous ! 🙂


Sociolinguistique: pour une année 2020 plus inclusive

Et voilà, 2019 est désormais derrière nous, cédant la place à la belle 2020. Oui, il y a quelque chose de beau avec 2020, c’est comme si on aurait reçu un 20/20 au lycée. Sauf qu’en 2020, tout est encore loin d’être parfait, et les clichés ont la vie dure. D’où mon souhait: que l’année 2020 soit plus inclusive!    

Si l’on parle souvent des fake news qui sont relayées par les médias, force est de constater que l’on évoque beaucoup moins les clichés qui sont véhiculés par ces mêmes médias, du moins à l’Ile Maurice. Un exemple, grande fut ma surprise en lisant ce matin dans un dominical mauricien “Sale temps pour la ménagère! » 

Grande fut ma surprise en lisant ce matin dans un dominical mauricien “Sale temps pour la ménagère! »

Pour une meilleure compréhension, replaçons d’abord cet article dans son contexte : un cyclone s’est récemment abattu sur l’Île Maurice, et une des conséquences de cet évènement est la hausse du prix des légumes vendus au marché. Certes, il est important de parler de ce phénomène dans un hebdomadaire de grand tirage, mais le titre de cet article pose tout de même problème. 

Pourquoi “la ménagère ? » Pourquoi pas “Sale temps pour les consommateurs » ?  Quelques individus croient-ils encore que faire la cuisine, acheter les légumes au marché et/ou tenir une maison n’est qu’une affaire de femme ? Quelle déception ! Cette titraille relève d’un pur cliché sexiste qui ne devrait plus exister en 2020.  Il est grand temps que les médias prennent conscience de l’importance de l’utilisation d’un langage inclusif, afin d’éviter de véhiculer des stéréotypes sexistes.  

Je reprendrais ici la définition de la Stratégie sur la parité des sexes des Nations Unies: Par langage inclusif, on entend le fait de s’exprimer, à l’oral comme à l’écrit, d’une façon non-discriminante, quels que soient le sexe ou l’identité de genre de la personne dont on parle ou à qui l’on s’adresse, sans véhiculer de stéréotypes de genre. Comme la langue a le pouvoir de faire évoluer les attitudes culturelles et sociales, l’emploi d’un langage inclusif est un bon moyen de promouvoir l’égalité de genre et de lutter contre les préjugés

Voici quelques éléments pour mettre en œuvre cette stratégie onusienne inclusive:  

1. Éviter les stéréotypes sexistes et les expressions discriminatoires ou à connotation négative. 

2. Désigner les femmes adultes que par « Madame », et ne plus faire de distinction entre « Mademoiselle » et « Madame », qui mettent l’accent sur le statut marital d’une femme

3. Ne pas rendre visible le genre des personnes dont vous parler quand cela est possible.

Pour conclure, je dirai qu’à New York, le contexte et les mentalités se prêtent merveilleusement bien à une société inclusive ! Mais à l’Ile Maurice après mon aventure onusienne, c’est la douche froide. Malheureusement, les choses sont nettement différentes et rétrogrades. Pas plus tard qu’hier, j’ai été témoin d’une scène hallucinante. Une femme adulte s’adresse poliment à une autre en lui disant “Madame XXX »; cette dernière visiblement vexée corrigea alors la première: “C‘est Mademoiselle XXX ». (!).  Navrant et choquant comme réaction !

Sur ce, Mesdames, Mesdames et Messieurs, il ne me reste plus qu’à vous souhaiter une merveilleuse année 2020. Gardons espoir ! 


Ile Maurice: les élections générales 2019 en 5 points

Ça y est ! L’Ile Maurice est passée aux urnes le jeudi 7 novembre 2019. Les résultats des élections ont été proclamés hier, et c’est la formation du Premier Ministre sortant, Pravind Jugnauth, qui a été reconduite au pouvoir. Je laisse le soin à mes confrères journalistes et éditoriaux d’analyser la portée politique du verdict des urnes. 

Pour ma part, c’était la deuxième fois que je votais aux élections générales à l’Ile Maurice. Plusieurs faits et évènements m’ont marquée lors de cette campagne électorale. En voici les cinq principaux : 

  1. Retard du dépouillement 

Incroyable! Des retards de plus de cinq heures! Les centres de votes ont fermé leurs portes le jeudi 7 novembre à 18heures, et a l’Ile Maurice, le décompte des voix se fait le lendemain matin à partir de 9h30 (normalement !). Sauf qu’hier, certains centres de dépouillement, a l’instar de celui de la 10e circonscription, ont débuté le décompte aux environs de… 15heures!! On peut dire que cette journée fut des plus longues et épuisantes, surtout pour ceux travaillant aux centres de dépouillement, pour les candidats et les journalistes couvrant les élections. Et pour les Mauriciens aussi!! De longues heures à réactualiser les navigateurs webs chaque cinq minutes, à être agglutinés aux Facebook live, à MBC1… bref c’était une journée marathon pour tout le monde!! 

2. Fille et fils de… 

C’est leur droit. Ils s’appellent Bérenger, David, Duval, Jugnauth, Koonjoo, Mohamed ou encore Uteem… Ils ont la particularité d’être des filles ou des fils de personnalités politiques mauriciennes: Premier ministres, Président ou ministres. De plus, ils ont en commun le fait d’avoir été élus dans les circonscriptions respectives où ils ont été candidats en 2019.  Pour remettre les choses en perspective, sachez que l’Ile Maurice est indépendante depuis 1968. Depuis 51ans, le poste de Premier ministre a été occupé  par deux paires de père-fils, soit les Ramgoolam et les Jugnauth, et par Paul Bérenger  qui a été chef du gouvernement pendant deux ans.  Le fait que les citoyens mauriciens retrouvent et élisent les mêmes patronymes 51 ans durant est significatif…

3. Obligation d’une catégorisation ethnique 

Cette année encore, les candidats du parti politique Resistans ek Alternativ n’ont pu être enregistrés comme candidats aux législatives. Pourquoi? Parce que ces candidats se présentent en tant que Mauriciens! Et oui, pour vous qui me lisez de Manhattan ou d’ailleurs, et qui ne connaissez pas toute la subtilité de la société mauricienne, sachez que le pays a hérité d’un système de classification ethnique datant la période coloniale britannique. Cet héritage, très lourd et loin d’être unificateur, ainsi que la Constitution mauricienne (autre cadeau des Anglais) imposent aux Mauriciens souhaitant briguer les suffrages de déclarer une prétendue catégorie ethnique (elles sont ici et ont été inventées par les Britanniques!). Ce qui est tout de même aberrant pour un état indépendant depuis 51ans et qui cherche encore à construire, avec peine, un mauricianisme unificateur et fédérateur.  

4. Aie, 6,813 votants sur la touche! 

Et oui, ce serait faux de dire que les élections 2019 se sont passées sans anicroches! Pour cause, selon la presse locale, c’est un total de 6,813 votants qui se sont présentés aux différents centres de votes, mais qui n’ont pu accomplir leur devoir civique car leurs noms ne figuraient pas/plus sur la liste officielle des votants. A qui la faute? Selon la Commission Electorale, c’était la responsabilité de chaque citoyen se vérifier s’il était bel et bien enregistré sur la liste des votants… Il y a, à l’heure où j’écris ces mots une pétition qui circule en ligne, dans l’objectif d’avoir de nouvelles élections pour permettre à ces 6,813 citoyens de voter… 

5. L’éveil aux réseaux sociaux 

La première grande campagne politique à se faire avec l’aide des réseaux sociaux fut celle de Barack Obama en 2008. On peut dire que c’est avec un retard considérable, soit onze ans plus tard, que l’Ile Maurice a connu une campagne électorale sur Facebook (nettement moins sur Twitter, que je j’adore!!) et autres journaux en ligne. Certes, il y a eu le fameux Viré Mam, d’une viralité déconcertante en 2014, mais rien de comparable avec 2019. Cet éveil aux réseaux sociaux, s’est rapidement transformé en réveil au champ de bataille, puis au cauchemar. Pour cause: désinformations, nouvelles fallacieuses, comptes Facebook bloqués, fuites d’informations confidentielles, calomnies et insultes en ligne ont été légions entre les deux principaux blocs politiques qui s’affrontaient. Abjecte!  

Cette campagne, chaque Mauricien l’a vécue à sa manière. Si les stratégies de certains partis étaient des plus basses et répugnantes, il est néanmoins crucial de saluer le calme et la civilité dont ont fait preuve les Mauriciens sur le terrain lors du jour du vote, ainsi que pendant toute la durée de la campagne. Une amélioration qui fait du bien.  Toutefois, d’autres éléments des législatives mériteraient d’être améliorés, dans le fond comme dans la forme. Rendez-vous en 2024 pour une prochaine joute électorale.   


New York: Ouverture de la 74e session de l’Assemblée Générale des Nations Unies

Cette semaine est marquée par l’ouverture de la 74e session de l’Assemblée Générale des Nations Unies (AGNU)! En effet, l’AGNU débute aujourd’hui, 17 septembre, mais le Débat général, vous savez l’intervention à la fameuse tribune des Nations Unies, se tiendra à partir du 24 septembre. Découvrez avec moi l’un des évènements mondiaux le plus attendu chaque année!

Le fameux hashtag géant UNGA! Photo: CR
Le fameux hashtag géant UNGA! Photo: CR

Il règne une ambiance particulière dans les rues de New-York! Manhattan est en effervescence: routes fermées, accès contrôlés, rehaussement des dispositifs de sécurité, équipes de journalistes du monde entier. Et oui, les yeux de la planète entière seront rivés sur New York du 17 au 30 septembre, pour la 74e session de l’Assemblée Générale des Nations Unies (AGNU)!

La 42e décrétée UNGA Security Zone! :-) Photo: CR
La 42e décrétée UNGA Security Zone! 🙂 Photo: CR

Les journalistes sont en poste devant les Nations Unies! Photo: CR
Les journalistes sont en poste devant les Nations Unies! Photo: CR

Forte mobilisation de la NYPD aux abords des Nations Unies! Photo: CR
Forte mobilisation de la NYPD aux abords des Nations Unies! Photo: CR

Qu’est-ce que l’AGNU? Il s’agit d’un moment unique où tous les grands de ce monde – comprenez par là les Chefs d’Etats du monde entier, ainsi que les dirigeants d’organisations internationales – se retrouvent dans un seul et même lieu, sur une seule et même plateforme pour discuter et débattre des grands enjeux et défis auxquels font face notre planète et nos sociétés respectives.

L'Assemblée Générale des Nations Unies vécue de l'intérieur :-) Photo: CR
L’Assemblée Générale des Nations Unies vécue de l’intérieur 🙂 Photo: CR

Et du beau monde il y en a! La magie de l’AGNU c’est que l’on peut croiser et saluer un grand nombre de personalités et Chefs d’Etat, en l’espace de quelques minutes. Pour ma part, j’ai eu l’occasion, lors de l’AGNU 2017, de croiser Emmanuel Macron, la Princesse Victoria de Suède, Justin Trudeau ou encore Théresa May. Mais la rencontre qui m’avais le plus marquee était celle de Jacinda Ardern, Première Ministre de la Nouvelle Zélande.

Ce fut une rencontre au hasard, alors qu’elle donnait une interview dans les Salons des Nations Unies, je coordonnais, pour ma part, l’arrivée d’un photographe pour une grande dame du multilinguisme et du multilatéralisme. J’avais donc saisi l’occasion pour saluer Jacinda Ardern au terme de son interview. Et grande fut ma surprise et joie, quand la Première Ministre prit deux à trois minutes pour échanger quelques paroles avec moi. Je crois que ce fut l’un des mes nombreux grands moments de l’AGNU!

Ma rencontre avec Jacinda Ardern fur l’un des mes nombreux grands moments de l’AGNU! Photo: CR
Ma rencontre avec Jacinda Ardern fur l’un des mes nombreux grands moments de l’AGNU! Photo: CR

Mais détrompez vous, vivre une AGNU ce n’est pas uniquement admirer une valse de Chefs d’Etat. Bien au contraire! Il faut dire que faire une AGNU de l’intérieur est quelque chose de très intense, physique et sportif. Les journées commencent tôt le matin et finissent très tard, souvent apres 23h. Entre accréditations, accompagnements, coordination multi-équipes et multilingues, préparation des bilatérales de haut-niveau, enchaînement des réunions et rencontres, changement de dernière minute au programme… la course, le stress et l’adrénaline sont au maximum!

Vivre une Assemblée Générale des Nations Unies, avec des délégations venues du monde entier, est une experience extrêmement enrichissante! Photo: CR
Vivre une Assemblée Générale des Nations Unies, avec des délégations venues du monde entier, est une experience extrêmement enrichissante! Photo: CR

Heureusement, l’AGNU c’est avant tout un formidable travail d’équipe. De plus l’énergie et le dynamisme new-yorkais aidant, cette experience est toujours extrêmement enrichissante! La 74e session de l’Assemblée Générale des Nations Unies (AGNU) promet d’être un évènement mémorable!